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« Une personne qui nous est chère ne nous quitte jamais. Elle vivra toujours au plus profond de nous »

J’ai été profondément affligée par la nouvelle du décès du Professeur Dominic Kwiatkowski, le jeudi 27 avril à l’âge de 69 ans. Expert de renommée mondiale en génomique, paludisme et santé publique, la vision ambitieuse de Dominic a réuni la communauté MalariaGEN. En effet, il m’a fallu 3 mois (27 avril – 27 juin) pour avoir le courage d’écrire cet hommage car je refusais de croire que notre cher Prof Kwiatkowski nous a vraiment quitté. 

Récemment en Mars 2023, lors d’une interview avec Digital Magazine Burkina (https://t.co/9WAWl0Yd5l), je rendais hommage à mes mentors y compris l’éminent Professeur Kwiatkowski pour son Mentoring dans le cadre du Projet MalariaGEN (https://www.malariagen.net/about/people), et de m’avoir permis à travers ce consortium de développer mes capacités d’analyse de données génétiques et surtout de bénéficier de formations certifiantes (Génomique des populations, Epidémiologie génétique, Génétique des populations humaines, Bio-informatique, Génomique comparative, Éthique de la génomique humaine).

J’ai donc eu l’honneur et une chance exceptionnelle d’avoir fait partie des chercheurs qui l’ont connu comme mentor, comme professeur, ou comme ami ; et pour tout cela, je lui dis MERCI !

Dominic, Grand chercheur a rejoint le personnel de l’Unité MRC (Medical Research Council) Gambie en 1985 en tant que chercheur du MRC. Le fait que le paludisme provoque la fièvre était connu ; mais dans les années 1980, les mécanismes par lesquels le parasite provoquait la fièvre n’étaient toujours pas connus et Dominic a relevé le défi ambitieux de comprendre et de percer ce mystère. A cette époque, les cytokines, médiateurs chimiques des réponses inflammatoires, venaient d’être identifiées, et Prof Kwiatkowski a montré que la fièvre induite par le paludisme était associée à une concentration élevée de TNF. 

En 1989, il est retourné au Royaume-Uni pour occuper un poste au Département de pédiatrie d’Oxford ; toutefois, il a continué à collaborer avec ses collègues du MRC Gambie sur des études sur le paludisme grave en menant des essais cliniques. Un premier essai a montré que la fièvre pouvait être diminuée par l’administration d’un anticorps monoclonal anti-TNF, l’une des premières études cliniques d’un anticorps monoclonal anti-cytokine. Ces études cliniques ont amené Prof à s’intéresser à comprendre pourquoi certains enfants développaient un paludisme grave, voire un paludisme cérébral, et d’autres non. Une des raisons possibles était une susceptibilité génétique due à une maladie grave et, en collaboration avec le Prof Adrian Hill, Prof Kwiatkowski et ses collègues, ont montré un lien entre la susceptibilité au paludisme grave, les gènes HLA spécifiques (HLA pour Human Leukocyte Antigen) et des facteurs génétiques influençant la production de TNF-alpha.

Au cours des années suivantes, cumulativement avec son poste à Oxford, Prof occupait le poste de chercheur, spécialiste en Génétique au Sanger Institute de Cambridge où il poursuivait non seulement ses travaux sur la génétique (susceptibilité humaine au paludisme), mais plus largement ses recherches sur la génétique du parasite du paludisme et son vecteur. 

L’un des héritages durables de Prof Kwiatkowski est sans nul doute, le consortium de MalariaGEN,un réseau mondial de scientifiques impliqués dans les études de la génétique du parasite du paludisme, de ses vecteurs et de son hôte humain, à qui ses conseils et ses encouragements manqueront beaucoup.

• Prof Kwiatkowski a très tôt réalisé que l’utilisation de la puissance de la génomique pour lutter contre le paludisme nécessiterait des données provenant de plusieurs études dans de nombreux pays. Aussi, la seule façon d’y parvenir était de mettre en réseau les chercheurs basés dans les pays où le paludisme était endémique.
• Prof Kwiatkowski a persuadé les bailleurs de fonds occidentaux d’investir dans des maladies qui affectent principalement les pays en développement ; en 2005, il a obtenu un financement de la Fondation Bill et Melinda Gates et du Welcome Trust pour créer le Malaria Genomic Epidemiology Network MalariaGEN (une communauté mondiale, avec plus de 200 chercheurs dans plus de 40 pays).
• Prof Kwiatkowski était passionné par l’idée d’offrir aux chercheurs des pays endémiques, les mêmes opportunités que les chercheurs du Royaume-Uni ou d’autres pays riches.

MalariaGEN dispose donc désormais de la plus grande banque de données au monde sur le paludisme, combinant la génomique des populations humaines, le parasite et les moustiques qui le propagent. Cette ressource est vitale pour le développement de nouveaux et meilleurs vaccins et finalement pour l’élimination de la maladie.

En 2020, il a pris sa retraite (Oxford), mais loin d’abandonner le travail, Prof Kwiatkowski s’installe avec son équipe au Sanger Institute. Avec le début de la pandémie de la Covid-19, il a été un acteur clé et indispensable dans la création de la Covid-19 Genomics Consortium UK (COG-UK) en mars 2020 (Ils ont séquencé des milliers d’échantillons du virus). L’unité de surveillance génomique du Sanger Institute, créée en 2021, continue de soutenir les initiatives de partage de données à l’échelle mondiale sur le paludisme, la Covid et d’autres maladies infectieuses, réalisant ainsi une vision que Prof avait proposé une décennie auparavant : ‘’surveillance génomique est un outil puissant pour la santé publique”.

• Merci à une personne humble et accessible qui n’a jamais cherché à se faire remarquer, mais que l’immensité de son talent n’a pas laissé inaperçu.
• Merci aussi au mentor si prévenant et si humain dans ses relations avec ses collègues chercheurs et avec ses étudiants en particulier. Merci pour votre engagement sincère et responsable, animé par votre souci des autres. 
• Merci au chercheur brillant pour ses travaux réalisés dans les régions où les populations sont exposées à plusieurs reprises aux parasites du paludisme, où certaines personnes meurent de l’infection tandis que d’autres en survivent.  
• Merci au “fantastique”, spécialiste en Pédiatrie, spécialiste de la recherche sur la santé mondiale et les maladies infectieuses et spécialiste de la génomique.
• Merci pour vos cours si rigoureux, si stimulants, si innovants.
• Merci pour vos communications, si captivantes, pétries de votre immense culture et de votre humour si délicat, communications toujours attendues et savourées avec gourmandise par votre auditoire. Merci pour tous les écrits de qualités que vous nous laissez.
• Et puis, merci au mentor que vous avez été pour les data fellow de MalariaGEN, le mentor généreux, accueillant, disponible, qui nous a guidé et a été très souvent notre ‘’Monsieur S.O.S ‘’.
• Merci pour tous les bons moments partagés durant nos séjours à Oxford, Cambridge et à Sanger Institute. 
• Merci de tout cœur, Prof Dominic Kwiatkowski, pour ce précieux privilège qu’ont été pour moi votre amitié et votre soutien.

Vous avez été une grande source d’inspiration pour nous tous !Reposez en paix, Prof Dominic Kwiatkowski !

Un hommage au Prof Dominic Kwiatkowski rendu par Dr Edith Christiane Bougouma

Digital Magazine Burkina, La Rédaction